Quel randonneur n'a pas fait au moins une fois dans sa vie l'ascension du Parmelan en empruntant, par le Grand ou le Petit Montoir, le sentier parfois vertigineux serpentant entre sous-bois, alpage et lapiaz.
En 1929, trois jeunes Annéciens réalisent cette montée de manière la plus insolite, à savoir... en automobile Peugeot 5CV.
Un sentier muletier a été établi par le club Alpin Français pour desservir le chalet-refuge Camille Dunant du Parmelan édifié en 1883 sur le plateau de « lapiaz » qui couronne les créneaux abrupts. Ce sentier est accessible aux charretons à deux roues qui transportent le matériel et les provisions du chalézan, tenancier du chalet-refuge, mais personne n'aurait songé à s'engager en automobile sur une piste qui a souvent des pentes de 20% et dont la chaussée s'éboule dans le précipice.
Le 23 juin 1929, messieurs Julien Vuilloud (au volant), Jean Morel et Jean Vernex quittent Annecy à 8h30, gagnant Dingy St Clair, puis le hameau de la Blonnière, d'où commence la véritable ascension ; la grimpée en bordure des prés pour arriver au chalet Chapuis vers 10h30.
Après un repos bien mérité pour la voiture, ils repartent à 13h par le sentier du Petit Montoir qui contourne les falaises en côtoyant le précipice, il faut veiller à ce que la voiture ne glisse pas dans le précipice. À un moment donné, le sentier est fait de quelques pièces de bois, pont de fortune sur la pente. Là, une roue tourne un instant dans le vide, au grand effroi des automobilistes.
Il faut porter l'arrière de la voiture à certains virages aigus, la pousser dans les pentes excessives ou lorsque le sol humide se dérobe sous les roues.
Bientôt, ils atteignent les « lapiaz », anfractuosités pratiquées dans le calcaire par l'action de la pluie et du gel. La 5CV est escortée d'une garde d'honneur de forestiers qui surveillent la forêt traversée et qui sont accourus au bruit insolite d'un moteur, croyant avoir à réprimer un acte de braconnage inattendu.
Encore quelques efforts moins durs sur le plateau mouvementé qui constitue le sommet ; l'automobile s'arrête à 16h35 devant le perron du chalet-refuge Camille Dunant (son initiateur) inauguré le 9 septembre 1883. Le chalézan du Parmelan si joyeux, après la surprise, de recevoir la visite d'une automobile qu'il tient à « arroser » cette première ascension à moteur, en offrant la Roussette de Seyssel, vin blanc cher aux Savoyards. Le transport du ravitaillement nécessaire au chalet-refuge se fait à dos de mulet jusqu'en 1947, maintenant c'est à l'aide d'un monte-charge depuis la Blonnière, qu'il se fait. La voiture prit le chemin du retour à 17h15 pour arriver à 20h30 à Dingy St Clair par le même chemin qu'à la montée.
Source : Bulletin municipale n°34 de Villaz